LE BRACELET ELECTRONIQUE

Le bracelet électronique dont le principe a été validé par la loi du 19 décembre 1997 a fait l’objet d’une expérimentation deux ans et demi après dont les résultats à notre connaissance n’ont pas été rendus publics. La loi dispose que le bracelet électronique s’applique aux personnes condamnées à moins d’un an de prison ou aux personnes dont le reliquat de peine est de moins d’un an. Il peut aussi s’appliquer comme modalité de la libération conditionnelle. En février 2000, les députés ont étendu son application aux prévenus comme alternative à la détention provisoire. Ce sont donc les JAP qui proposent aux condamnés, au cas par cas, c’est-à-dire en fonction de leur capacité à prouver leur bonne volonté, ce boulet électronique ; le consentement des forçats modernes est obligatoire. La dernière loi Perben généralise le dispositif à 3 000 personnes condamnées ou placées sous contrôle judiciaire avec un petit additif : jusqu’alors aucune possibilité n’existait pour révoquer la mesure quand l ’intéressé adoptait un comportement inacceptable sans pour autant violer les obligations imposées, c’est désormais chose faite. Quand on sait que ce sont les matons qui seront chargés de la bonne exécution de la mesure…
Pour couper court à l’argument fallacieux qui prétend que le bracelet électronique désengorgerait les prisons et serait une peine alternative à l’incarcération, rappelons juste que pour les mêmes délits, la loi sur la présomption d’innocence ne prévoyait pas d’incarcération et que pour les condamnés à de longues peines, l’obtention d’une libération conditionnelle n’était pas soumise à une surveillance supplémentaire. Il y a donc une aggravation pour l’ensemble de ces cas.
Comme pour les TIG qui sont une peine supplémentaire dans le panel répressif des chambres correctionnelles, les juges d’instruction pourraient être tentés de proposer aux plus de 20 000 personnes placées sous contrôle judiciaire le bracelet électronique (cette hypothèse n’attend plus que le secours de la technique et des investissements). En Suède, 56 % des porteurs de bracelets sont des délinquants routiers (conduite en état d’ivresse), aux Etats Unis, cette mesure s’applique pour défaut de règlement de pension alimentaire.
Ces nouvelles prisons domiciliaires sont beaucoup moins chères pour l’Etat que les établissements pénitentiaires : en France un prisonnier coûte environ 400 francs par jour, la surveillance électronique devrait coûter entre 80 et 120 francs par porteur. De plus ce nouveau prisonnier devra impérativement avoir un domicile, une ligne téléphonique, un travail pour pouvoir en bénéficier. C’est du pain béni pour les VIP délinquants !

LE PONTET : de la publicité à la réalité


Seysses et le Pontet sont les deux premières prisons du plan 4 000 à être quasiment terminées. Le Pontet (Centre Pénitentiaire de 605 places), près d’Avignon, a été inauguré le 19 décembre et « ouvrira » ses portes en avril 2003. Ce CP fût présenté comme modèle au niveau sécuritaire : dispositif anti hélicoptère renforcé, un no man’s land grillagé de trente mètres à l’extérieur des murs d’enceinte, deux miradors de douze mètres de haut… mais la réalité, d’après les matons, est toute autre Le centre de détention de 160 places ne possède pas de cour intérieure qui permet habituellement aux matons, un seul par étage, de se surveiller entre eux. Les étages sont sous vidéo-surveillance mais il demeure de nombreux angles morts. L’unique moyen pour déclencher l’alerte est un boîtier électronique que chaque gardien portera sur lui. Il n’y a pas de filin sur les toits, le troisième mirador de six mètres de haut est inefficace, et les « avenues » ne sont pas aussi compartimentées que le projet le p révoyait. Les condamnés, les prévenus et les mineurs pourront toujours se rencontrer en allant aux parloirs, au gymnase et à l’infirmerie. Pour l’anecdote, notons que les syndicats de matons menacent de manifester pour la création de trente postes supplémentaires, mais vu comment s’est passé le dernier concours de recrutement (800 reçus sur 10 500), ça ne va pas être facile…
Big Brother est fort, mais pas invincible, sa puissance dépend aussi de la publicité qu’il en fait. Les budgets alloués pour les constructions de taules sont énormes, mais pas encore suffisants pour annihiler tout espoir de concertations, de conspirations, de résistances. A nous de creuser les failles.