LE CONSENSUS POLITIQUE (suite)

LES ASSOCIATIONS
Attac est un bon exemple de ce qui constitue les bases est les points communs du tissu associatif. Attac (association pour une taxe tobin d’aide aux citoyens) est un groupe reconnu par l’Etat, une centaine de parlementaires en fait partie, Jospin en a été président d’honneur, des conseils municipaux entiers y ont adhéré, attac a une tribune ouverte dans le Monde diplomatique. Le programme d’attac se résume théoriquement à réclamer la taxation à 0,1 % des mouvements internationaux de capitaux. Attac lutte donc contre l’économie débridée, contre l’ultra-libéralisme et pour une mondialisation alternative. Attac se bat pour un capitalisme européen capable de se dégager du joug américain. En clair, Attac se bat contre le capitalisme financier pour en revenir au bon vieux temps de l’Etat providence, régulateur d’un capitalisme à visage humain : Attac se bat pour la mondialisation de l’Etat. Ce choix contient le consensus autour de l’idée de l’Etat : la critique du rapport de production capitaliste se limite à la critique des grosses multinationales qui priveraient l’être humain de sa vie, de son espace, de son travail. Ce projet se veut interclassiste mais réunit dans les faits la classe moyenne, les intellectuels, les déçus de la gauche et les isolés qui ne trouvent plus de structures pour s’exprimer. C’est l’expression même de la social-démocratie, faire passer ses intérêts pour l’intérêt général. Pourtant, eux qui prônent la concertation large, égalitaire, ont un fonctionnement organisationnel pyramidal, des dirigeants auto proclamés. Leur moyen d’action : le contrôle citoyen exercé par des pseudo spécialistes, des personnalités socialement reconnues qui seraient chargées de constater les faits et de les présenter à l’arbitrage bienveillant de l’Etat, seul décideur légitime qu’ils reconnaissent. Attac ne connaît pas de problèmes de financement vu la qualité de ses adhérents et sa reconnaissance ; pas de problèmes pour avoir une salle, des autorisations institutionnelles. Le prochain forum social européen qui se tiendra à Paris en octobre 2003 sera doté de 19,5 millions d’euros. Ce n’est pas aussi simple pour tout le monde : avoir des notables dans ses rangs n’est pas donné à tous. Pour beaucoup il faut déployer des forces incroyables pour obtenir des moyens qui seront sans cesse remis en cause. Pour les moins scrupuleux, il faudra gratter des subventions, geste qui réduira en partie ou totalement leur liberté d’activité. Celle-ci se réduisant souvent à la sauvegarde de leur structure : peu à peu le contenu de l’objet de l’association s’efface au profit du fonctionnement formel. Le chômage aidant, le secteur associatif a même pu être perçu comme un débouché professionnel possible, ce qui peut induire une logique de petits intérêts personnels qu’ils soient financiers ou politiciens. Les associations en échange de moyens acceptent le cadre légal fixé par l’État et la place qui leur est assignée dans le tissu social et ainsi elles deviennent à leur tour un rouage actif du contrat social : par exemple, à l’échelle d’une commune, cela peut se traduire par l’adhésion des associations aux contrats locaux de sécurité qui les unissent aux forces de l’ordre, à la fonction publique, aux commerçants pour éradiquer la poignée de sauvageons qui seraient la cause de tous les maux, pour circonscrire ou éliminer ce qui se différencie, s’écarte, menace. Ce qui est valable pour une ville l’est pour le pays, l’État n’ayant pas les moyens de mettre un flic derrière chaque personne, habilement s’ingénue à le faire germer dans chaque tête, vampirisant les corps et les consciences afin de créer les conditions nécessaires à une pacification du corps social adaptée à l’extension du capitalisme et de ses nouveaux moyens (nucléaire, informatique…).