LA PRISON EST PLUS VIOLENTE QUE MOHAMED… …

Le jeudi 1er août 2002, à la maison d’arrêt de Valence, alors que les prisonniers regagnaient leurs cellules, un surveillant a jugé bon de procéder à une fouille corporelle de Mohamed S. Celui-ci a refusé de se laisser faire : ce surveillant X., délégué syndical CFTC, a porté plainte pour violences. Voici pour les faits.

Les fouilles à corps, dont l’inutilité et le caractère dégradant ont été reconnus par les instances juridiques européennes, demeurent une pratique aussi courante qu’humiliante dans les prisons françaises. Quoi d’étonnant à ce que Mohamed, ayant eu à la subir concrètement, ait réagi tout aussi concrètement, tout comme d’autres prisonniers l’avaient déjà fait dans d’autres prisons comme Fleury, Nanterre ou Fresnes. Le plus surprenant est que la résistance face à ces atteintes à la dignité ne soit pas plus fréquente.
Pour ces faits, Mohamed S. a été condamné à quarante-cinq jours de mitard après comparution devant le prétoire. Le prétoire est une sorte de tribunal administratif interne aux prisons, dirigé par le personnel pénitentiaire – qui se trouve du coup juge et partie dans des condamnations sans appel. Le mitard est une cellule de force d’environ 3,60 m sur 1,40 m où l’on reste enfermé seul, sans aucun contact avec l’extérieur, privé de toute cantine et sujet à toutes les exactions possibles. Force est de constater qu’il est actuellement en train de purger cette peine. Cela étant, Mohamed comparaît aujourd’hui, lundi 26 août 2002, devant un autre tribunal pour subir une deuxième condamnation pour les mêmes faits.
Les prisonniers ayant assisté à la scène, coutumiers de l’arbitraire pénitentiaire, ont manifesté leur indignation : la seule réponse de l’Administration pénitentiaire a été d’appeler les forces de l’ordre à la rescousse, de priver l’ensemble de la détention des repas du soir et de transférer une vingtaine de détenus dans d’autres établissements. Cela leur permet de faire porter à Mohamed la responsabilité de l’ensemble des événements et d’écarter les témoins.
L’analyse des faits connus publiquement doit conduire à l’acquittement pur et simple de Mohamed. De plus, ce que prônent l’Administration pénitentiaire, les médias et diverses associations, à savoir que « le projet de construction d’un nouveau centre pénitentiaire à Valence est donc plus que jamais d’actualité » (« Drôme Info Hebdo » du 23 août 02), n’est pas une solution. Même si elle génère des conditions de détention plus dramatiques, la surpopulation carcérale a bon dos ; tant qu’il y aura des prisons, il y aura des émeutes. OIP, groupe local de Valence, Collectif solidarité prisonniers

LA JUSTICE EST PLUS VIOLENTE QUE MOHAMED.

Le tribunal correctionnel de Valence a condamné lundi 26 août 2002 Mohamed à un an de prison pour une gifle donnée à un gardien de la prison de cette ville en début du mois d’août passé.
La présidente du tribunal a donc suivi le réquisitoire du procureur qui demandait huit mois ferme et celui de l’avocate qui réclamait quatre mois – soit huit plus quatre égalent douze – et le tribunal s’en fut content !
Résumons ici le cynisme des acteurs et actrices de cette triste farce :
La présidente : « Deux par cellule, c’est presque du confort, vous devriez être heureux… »
Le procureur : « On va l’aider à mûrir en prison ! Soit c’est la prison, soit c’est l’hôpital psychiatrique ! A vous de choisir. »
L’avocate : « C’est un geste grave qu’il faut évidemment sanctionner. »
La présidente : « On va vous mettre à l’abri quelque temps pour vous empêcher de nuire à votre prochain. »
Le procureur : « Passe encore que vous frappiez un copain dans la rue, mais frapper un agent de l’autorité […] nous n’allons pas changer le Code pénal ni le fonctionnement des maisons d’arrêt pour monsieur Mohamed [...] il va falloir attendre de longs mois, peut-être de longues années en prison pour devenir adulte ! »
La présidente : « Vous avez refusé une fouille, mais depuis quand est-ce qu’on peut demander à un gardien pour quelle raison il désire vous fouiller ! »
Le procureur : « Il faut protéger la société de monsieur Mohamed. »
Tant de cynisme et de mépris à propos d’une altercation en prison ressemble furieusement à une provocation.
Le surveillant à la maison d’arrêt interpelle Mohamed au retour du sport et veut le fouiller. Celui-ci en demande la raison, le gardien refuse de lui donner des explications et veut procéder à la fouille. Il reçoit alors une baffe. Le surveillant soupçonnait Mohamed de cacher un portable sur lui. A son arrivée au mitard, il se révèle qu’il ne dissimulait absolument rien sur lui.
Ses camarades présents refusent par solidarité de regagner leur cellule et la direction appelle la police qui occupe alors la prison un jour durant en bloquant les rues voisines. Durant ce déploiement de force, les prisonniers sont privés des repas du soir et une vingtaine d’entre eux sont transférés dans d’autres prisons.
En dénonçant ce verdict inique, nous accusons la justice de Valence d’avoir transformé Mohamed en bouc émissaire, alors qu’il n’est en rien responsable du mouvement de révolte consécutif à son départ pour le mitard.
Collectif solidarité prisonniers