Lettre à l’attention de la direction,
Maison centrale de Saint-Maur .
Bel-Air,
36255 Saint-Maur.

Boulogne,
le 19 février 2002.

Monsieur le Directeur,Comme vous le savez, je suis le conseil de M. Michel Ghellam, détenu à la maison centrale de Saint-Maur depuis novembre dernier.
M. Michel Ghellam m’a fait part, lors de ma visite d’hier, de son placement en isolement en l’absence de motif valable depuis le 13 février 2002.
Après ma visite, un surveillant m’a informé de votre souhait de me rencontrer afin d’évoquer, je le suppose, la situation de mon client.
Cet entretien me paraissait au plus haut point utile afin de vous demander quelques explications concernant le sort malheureux réservé à M. Michel Ghellam au sein de l’établissement pénitentiaire quand il m’a été précisé, qu’en fin de compte vous ne désiriez plus me voir.
Sur ce, je tiens à vous faire part de mes vives protestations quant à la mesure d’isolement renforcée appliquée à M. Michel Ghellam depuis le 13 février 2002.
Alors qu’il effectuait sa peine dans des conditions dites normales depuis le 10 décembre 2001, M. Michel Ghellam a été placé à l’isolement total le 13 février 2002 sans qu’il y ait eu un quelconque incident en détention et sous le prétexte d’assurer « la sécurité de l’établissement », lequel est pourtant qualifié par l’administration d’« établissement de haute sécurité » (sic).
Aucun fait précis ni aucun motif circonstancié n’a été exposé à M. Michel Ghellam pour justifier cette mesure d’exception qui entache naturellement ses conditions de détention.
Finalement, le 18 février 2002, M. Michel Ghellam s’est vu notifier une nouvelle décision de placement en isolement évoquant cette fois « des préparatifs d’évasion » lesquels n’avaient pas été visés lors de son placement en isolement initial du 13 février 2002.
Cette motivation est tout à la fois en contradiction avec les motifs invoqués le 13 février 2002, mais surtout parfaitement infondée, puisque M. Michel Ghellam se trouvait déjà à l’isolement depuis cinq jours…
Les prétextes allégués, qui sont parfaitement contradictoires et dont la nature varie dans le temps, ne reflètent absolument pas l’attitude de M. Michel Ghellam, qui entend protester formellement d’une quelconque atteinte à la sécurité de votre établissement ou de toute velléité d’évasion.
En réalité, une fois de plus, mon client et moi-même avons le regret de constater que l’Administration pénitentiaire utilise une mesure dite d’ordre intérieur afin d’infliger une sanction et l’on sait bien dans quel but…
La mise à l’isolement constitue une véritable constante s’agissant du cas Ghellam, puisque celui-ci se trouve depuis près de dix ans ballotté de quartier d’isolement en quartier d’isolement, toujours sous des prétextes fallacieux et dont le prétendu souci de préserver la sécurité de l’établissement n’est pas moins usité.
Je vous rappelle que des médecins ont attesté de ce que l’état de santé de M. Michel Ghellam est rigoureusement incompatible avec une mesure d’isolement.
C’est pourquoi la mesure prise à son encontre est à la fois injuste et injustifiée.
Dans ces conditions, il est urgent de replacer M. Michel Ghellam sous un régime de détention ordinaire ou d’envisager avec vos supérieurs hiérarchiques un transfert dans une autre centrale et ce, dans des conditions « normales » de détention.
En tout état de cause, je me vois contrainte une fois de plus d’engager les recours administratifs adéquats afin de voir constaté le mal-fondé des mesures infligées à M. Ghellam.
Je tenais à vous en aviser et vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de ma considération distinguée.

Françoise Luneau (avocate de Michel Ghellam)